Le sifflement du serpent : du son inarticulé à la mise en musique - ENS - École normale supérieure Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2012

Le sifflement du serpent : du son inarticulé à la mise en musique

Résumé

Dans la pensée grecque, les cris des animaux ne sauraient être associés au logos humain, car ils sont formés de sons inarticulés. Le serpent en est sans doute le paradigme : dans la plupart des cultures, son cri est généralement transcrit par une onomatopée si brève qu'elle ne convoque que la consonne sourde [s], sans la moindre vocalisation. Au premier abord donc, on serait tenté de penser que le serpent est étranger à toute forme de musique : c'est la voyelle qui porte par excellence la mélodie, et les Grecs l'avaient bien compris dans leur système de notation musicale. Mais il faut dépasser cette première expérience acoustique. Le serpent est bel et bien considéré par les Grecs comme un animal musicien, au même titre que les cigales qui ont elles aussi un chant plutôt consonantique. Le paradoxe est évident quand on considère le nom grec donné au sifflement du serpent : syrigma. Si la racine porte bien l'onomatopée attendue, on constate que le même mot est employé pour désigner le son d'un instrument de musique, la célèbre flûte de Pan. Mieux encore, le sifflement de Python, qu'Apollon tue de ses flèches à Delphes, a donné lieu dès le VI e siècle av. J.-C. à un passage obligé de la composition musicale que tout artiste doit créer et interpréter dans les concours de Delphes, le nome pythique. En effet, dans une de ses parties, appelée syringes, le musicien devait reproduire avec l'aulos pythique, instrument spécifique aux concours delphiques, les sifflements du serpent agonisant sous les traits d'Apollon. L'enjeu est alors crucial : il s'agit de mettre en musique ce qui est proprement non-musical. AbStRACt The hissing of the snake: how is it possible to set an inarticulate sound to music ? For a Greek mind animal cries cannot be associated to human logos, for being inarticulate sounds. One of the best examples is the snake, whose cry is usually transcribed by the consonant [s], without any vocalizing. Therefore, snakes seem not to be musicians: melody is produced by vocals, according to Greek treatises on music. However, snakes are considered as musician animals by Greeks, like cicadas. The word syrigma, that Greeks used to define the hissing of the snake, means also the sound of the Pan flute. Moreover, Pytho's hissing becomes a theme of a musical composition that every musician has to make and to perform at the Pythian Games, the nomos pythikos: in one of its parts, he has to depict, with his Pythian aulos, the hissing Pytho gives when it is killed by Apollo's arrows. By consequence, he has to set to music something that is properly not musical.
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  • HAL Id : halshs-01632650 , version 1

Citer

Sylvain Perrot. Le sifflement du serpent : du son inarticulé à la mise en musique. S. Barbara, J. Trinquier. Ophiaka. Diffusion et réception des savoirs antiques sur les ophidiens, 47 (1), pp.345-361, 2012, Anthropozoologica. ⟨halshs-01632650⟩
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